jeudi, décembre 27, 2007

Agnus Dei


Agnus Dei fait suite à un cauchemar que j'ai eu, impliquant directement mon héroine dans un contexte particulièrement morbide.
Le début s'inscrivait dans une ambiance lourde, de celle qui vous indique d'emblée de jeu que ça va mal se passer, une cathédrale plongée dans la pénombre, sans aucune couleur, où même les vitraux étaient crasseux. Un groupe semblait s'amasser autour de l'orgue posé à même le sol. Moi qui me représente toujours les orgues en hauteurs, inaccessible du commun des mortels, j'étais pour le moins surpris, d'autant plus que tout me rappelait un dessin que j'avais fait des mois auparavant, Toccata. Pourtant Bothan semblait prise de terreur, hoquetant de sanglots devant cet orgue et ce cahier de notes qui n'indiquait que deux morceaux, le premier étant ce fameux toccata. Mon point de vue semblait limité, puisque je ne parvenais pas à bouger depuis ma place dans le public. De là, je ne pouvais de là que voir son dos secouer de longs frissons de peur. Pourquoi? Je tente de bouger, mais quelque chose me retiens aux épaules. C'est un rêve qui me retient prisonnier? Peu importe, ce n'est pas le premier. Je la regarde et essaie de l'encourager. Même ma voix semble étouffée dans ma gorge, aucun son n'est émis... L'ambiance s'allourdit considérablement, et je remarque qu'hormis Bothan, tout est en noir et blanc et a un aspect granuleux. Kitsune détonnait tant dans cet environnement qu'elle paraissait être un ange. J'étais fier d'elle...
Après un long instant d'hésitation, elle commence le premier morceau, le toccata de sa création. Les notes issues des tuyaux de l'orgue m'enveloppent et m'arrachent des frissons. Bon sang, c'est divinement exécuté, et la cathedrale rend chacune de ses notes comme celui d'un chant céleste. La peut de Bothan semble s'être évanouie, et elle enchaine les pages dans une telle grâce que je ne pouvais m'empêcher d'avoir les larmes aux yeux. C'est bien ma Bothan, celle qui me fait rêver et espérer. Un sourire s'affichait sur son visage comme un défi à ce public qui ne démordait pas de leur attitude pédante et coincée. Vous n'aimez pas? Peu importe, j'apprécie chacune de mes notes. Il aurait été un véritable sacrilège de ma part que de dire quoi que ce soit tant que son toccata ne soit pas terminé, de briser cette harmonie céleste.
Succès. Sans faute. L'orgue se tait et je m'attendais à quelques applaudissements. Combien j'étais fier d'elle, et combien je voulais le lui montrer! Non. Rien n'émanait du public que de l'indifférence. A vrai dire c'était autre chose qui transparaissait. Comme une morbide attente. Mais quoi? Bothan le sentait, et à nouveau le désespoir l'envahissait, des sentiments négatifs d'autant plus appuyés par l'indifférence du public devant sa prestation pourtant parfaite. Les sanglots la gagnèrent à nouveau, et ce n'était pas sa main sur le médaillon qui allait lui redonner confiance. Je me débats, je veux lui hurler mon soutien, mais je reste aphone et toujours enchaîné par d'invisibles liens. Elle se perd dans ses pensées, et regarde le dernier carnet de notes. Agnus Dei? N'est-ce pas en fait le Adagio de Samuel Barber? Je la connaissais comme un morceau pour violon ou pour un choeur, pas pour un orgue! Elle s'exécute.
C'est ca, l'Adagio. Pourquoi Agnus Dei? Qu'importe, c'est divin. J'écoute ce morceau qui m'arrache à nouveau de délicieux frissons de plaisir. J'adore l'orgue et apprécie chacune des notes jusqu'à en oublier l'ambiance oppressante.
Jusqu'à ce qu'elle ne loupe une note due à son stress.
Quelqu'un du public sort un taser et l'électrocute alors. Je sursaute tout autant que j'essaie de hurler mon indignation. Je reste toujours autant bloqué et tributaire de ces chaines invisibles. Elle continue malgré ce choc à jouer, d'autant plus concentrée sur sa performance. Cela n'empêche pas une autre fausse note. Quelqu'un se penche alors et ramasse une pierre avant de la lui lancer. D'autres rejoignent son geste. Cela tourne à la lapidation. Je tire sur ces chaines mais ne parviens pas à bouger pour autant. Les mauvaises notes s'enchainent, et le massacre continue tout autant. Certains lui jettent des chandeliers, d'autres sortent des arbalètes et lui tirent des flèches sur elle, d'autres encore préfèrent leurs armes à feu. J'ai dû hurler dans mon cauchemar tant je désespérais de ne pouvoir intervenir. Elle encaissait coup sur coup mais ne démordait pas à finir son morceau. Si j'en avais eu l'occasion, je lui aurais hurlé de s'enfuir plutôt que de s'entêter à terminer l'Agnus Dei.
J'essaie de fermer les yeux sur cette mise à mort. Voir Bothan s'effondrer lentement sur le clavier après chacun des coups qu'elle recevait et pourtant s'obstiner à terminer son morceau insinuait quantité de pensées contradictoires en moi. Fuis bon sang, fuis... Non, le spectacle se devait de continuer malgré les huées, malgré la haine. Je tire sur ces chaines jusqu'à en pleurer, j'ai mal partout, je veux la protéger... Je veux la recouvrir de mon corps, je ne veux pas qu'elle soit blessée devant moi. Pitié, que quelqu'un l'aide, que quelqu'un la sauve! Ici, nul héros comme Arès ou Aesir, c'était une exécution publique dont le motif m'échappait. La faute est humaine, pourquoi la condamner à mort pour avoir émis une première fausse note? Dernière page, elle enchaîne difficilement les dernières notes mais parvient à terminer l'Agnus Dei avant de s'effondrer sur le clavier, arrachant une plainte surnaturelle à l'orgue qui s'engouffra dans la cathédrale. Son dernier chant. M'étais-je arraché les épaules hors de ces chaines? Peu importe, je cours vers elle et la prend dans mes bras. Mes larmes tombaient à chaudes gouttes sur son visage tumifiée, ses yeux déjà vide de vie. Ses lèvres remuèrent faiblement, et je ne pouvais qu'écouter ses dernières paroles. Je suis désolée, pardonne-moi... Je secoue la tête et essaie de trouver toute la force nécessaire en moi pour retrouver les bons gestes à faire, des points de compression et autres gestes nécessaire pour sa survie. J'essaie tout ce qui est en mon pouvoir, mais combien c'était inutile... La vie la quitte... Je me retourne pour chercher du regard un de ces meurtriers. Ils devaient payer pour leurs crimes! Mais la cathédrale avait fait place à une immense plaine à l'herbe brûlée... Et seule Bothan me restait dans les bras. Là, je cherche les derniers éclats de mon courage pour lui fermer les yeux. Adieu Bothan...

Réveil. Je suis baigné de larmes. J'essaie de retrouver mon souffle. Ce cauchemar avait une signification plus importante qu'il n'y paraissait en premier lieu...
Tout avait commencé par un Toccata, tout allait se terminer avec un Agnus Dei...

Aquarelle et crayons, le 26 Décembre 2007

3 commentaires:

Anonyme a dit…

Ton dessin est vraiment magnifique et tu m'as raconté le rêve que tu as fait. Il était vraiment touchant!! De plus, j'ai eu la chance de pouvoir te regarder finir ce dessin. C'était super!! Je t'adore Amiral!!

Anonyme a dit…

Mince... ton rêve est très... dur a vivre, je suis vraiment désolé que tu ai vécu cela.

Néanmoins je pense que ce rêve pourrait être une sorte, "d'avertissement", c'est à dire que je pense que tu fais trop souffrir ton personnage (kitsune bothan), elle a perdu son amant, c'est à la base un chasseur de primes, etc... et la souffrance que tu lui donnes doit probablement te faire souffir toi-même, ce qui expliquerait pourquoi tu ne pouvais pas bouger pendant ton rêve, que tu ne pouvais rien faire.... n'y vois aucune attaque, je ne fais que d'exposer mon interpretation... en tout cas remet-toi bien de ce cauchemard ;)

Lightbird

Anonyme a dit…

je compatis franchement c'est dur de vivre ca

si ca arrivait a Kate leonin (mon perso antropomorphe, une tigresse)ma colere serait monté a un point tel queje me lancerais en chasse de chaque perssone ayant participé a son lynchageet je les aurait tué une par une avec un esprit de vengence implacable...

c'est vraiment trop triste ...